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Fanny Lardillier et Sarah Khelifi
Les néonicotinoïdes sont des insecticides utilisés pour protéger les betteraves de la jaunisse. Extrêmement nocifs pour l’environnement, ils viennent à nouveau d’être interdits en France. Soulevant une question ultra-sensible : comment assurer un avenir à la filière betteravière sans son insecticide le plus efficace ?
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Le 3 mai 2023, le Conseil d’État a jugé que les dérogations accordées en 2021 et 2022 pour l’utilisation des néonicotinoïdes, un insecticide utilisé pour protéger les semences de betteraves sucrières, était illégales dans la mesure où elles avaient été interdites par la Commission Européenne en 2018. Le 19 janvier 2023, la Cour de justice européenne avait par ailleurs interdit le renouvellement des dérogations, estimant qu’aucune d’elles n’était justifiées, peu importent les circonstances.
Cet insecticide, souvent qualifié de « tueur d’abeilles », avait été en 2020 l’objet de dérogations après son interdiction pour faire face à la jaunisse de la betterave. Cette maladie véhiculée par les pucerons s’en prend aux plantations. En 2020, la jaunisse de la betterave était responsable d’environ 27,70 % de perte de rendements selon le Ministère de l’agriculture. Des chiffres à nuancer toutefois selon l’association Pollinis puisque ces chiffres ne tiennent pas compte de la sécheresse, également responsable de la perte de rendements.
Les dérogations accordées par l’Etat Français en 2021 et 2022 avaient fait l’objet de vives contestations de la part de syndicats agricoles, d’apiculteurs et d’associations environnementales. C’est le cas de l’association écologiste Générations futures. Elle dénonce la nocivité des néonicotinoïdes responsables de la mort des abeilles et autres pollinisateurs. Le chimiste et toxicologue au CNRS Jean-Marc Bonmatin explique dans un entretien à Libération que “80 à 95% des substances utilisées en enrobage de semences partent en réalité dans les sols, où elles s’accumulent et peuvent persister entre un et trente ans”.
« Ça fait trois ans qu’on fait de la betterave en bio. On n’a pas été touché par la jaunisse de la betterave plus que ça, parce qu’on a décalé nos dates de semis.
– Jean Louis Proust, betteravier bio à Lewarde »
Face à la dangerosité de l’insecticide, également nocif pour l’Homme, des agriculteurs cherchent à développer d’autres solutions. C’est le cas de Jean Louis Proust, agriculteur à Lewarde, qui cultive des betteraves sans utiliser de pesticides. La recherche est également lancée puisqu’en 2020 le ministère de l’Agriculture avait lancé un plan national de recherche et d’innovation. L’Anses a ainsi identifié 22 alternatives, mais la rubrique Check News de Libération établit que seules quatre d’entres elles sont réellement efficaces et abouties.
“[La fermeture de la sucrerie d’Escaudoeuvre] c’est un drame local, parce qu’on est dans une zone rurale. À chaque fois que vous fermez une sucrerie, ce sont des emplois perdus avec des remplacements difficiles.”
– Guillaume Wullens, président de la CGB, élu local Terreros
Pour l’agriculteur Guillaume Wullens, l’arrêt des dérogations est encore trop abrupte. Malgré toutes les recherches, rien ne garantit de trouver d’autres solutions aussi efficaces face à la jaunisse de la betterave. Le 8 mars 2023, le groupe Tereos annonce la fermeture de la sucrerie Escaudoeuvre (Nord), qui était confrontée à une baisse de rendements, principalement dû aux conséquences de la jaunisse à la betterave et des sécheresses qui sévissent. Mais sans préciser que le problème est d’abord économique, puisque les quotas de sucre et le prix minimum garanti aux producteurs a été interdit en octobre 2017, entraînant un effondrement du marché.
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